En juin, nous avons fêté la nouvelle année maorie. Revenons sur cet évènement très important dans la culture maorie, le Matariki.

Il y a quelque temps, nous avons publié la vidéo sur les festivités du Matariki (si vous ne l’avez pas vu, c’est l’occasion) qui se sont déroulées en juin et juillet dernier. Prenons le temps de découvrir cette fête, chère au coeur des néo-zélandais.

Le Matariki, entre ciel et terre

Selon une légende maorie, les sept étoiles qui forment les Matariki (littéralement “les yeux de dieu” ou aussi “petits yeux”) seraient en fait les yeux du Dieu des vents, qui, de rage, se les arracha et les jeta dans le ciel lorsqu’il apprit que la mère-terre (Papatuuaanuku) et le père du ciel (Ranguini) avaient été séparés par leurs enfants pour laisser entrer la lumière et créer le Monde.

matariki nasa 2012

Les étoiles Matariki en 2012 – image de la NASA

L’apparition des Matariki au mois de juin est l’annonce de la fin de l’année et de l’avènement d’une nouvelle pour le peuple maori. À cette époque de l’année (début de l’hiver austral), la saison des récoltes est terminée, il y a moins de travail dans les champs.

La période est donc propice pour se retrouver en famille, honorer ses ancêtres et préparer la nouvelle année. Car en plus d’être un signe de renouveau, le Matariki avait aussi un rôle de prédiction :  un ciel dégagé signifiait que les récoltes seraient prolifiques, dans le cas contraire, une année froide et infertile se préparait.

Une fois les étoiles Matariki visibles à l’horizon, le peuple maori attendait l’apparition de la nouvelle lune avant d’entamer les festivités. À partir de ce moment, et pendant un mois, le travail dans les champs laissait place aux danses, aux chants, aux jeux en famille et à l’éducation des plus jeunes. Autrefois oublié, le Matariki est désormais remis sur le devant de la scène à travers de nombreuses animations dans tout le pays.

Le Matariki des traditions

Nous étions de retour sur Auckland pour participer aux animations. Premier rendez-vous donné au festival du cerf volant au marae d’Orakei, le Manu Aute Kite Day. [Te Manu signifie l’oiseau en maori] Le cerf-volant tient une place à part dans la culture maorie et notamment lors du Matariki. Ils sont les liens de connexion entre le Ciel et la Terre. Dans le marae, un atelier permettait aux enfants, comme aux adultes de fabriqué leur propre cerf-volant, à partir de fibres végétales tressées, et de les décorés de coquillages et de plumes.

Historiquement, le Matariki est un temps joyeux qui laisse une très grande place aux jeux et aux arts maoris. Cela n’a pas changé aujourd’hui : le Matariki est l’occasion pour les anciens d’initier les plus jeunes aux arts et aux techniques de création ancestrale maories. Mais ce qui nous a frappés dans ces festivités, c’est le côté très familial de l’évènement : on y vient avec les grands-parents et les petits enfants, on le vit avec sa communauté, avec ses voisins… Il y a, de ce qu’on a constaté, un véritable sens du partage lors de cet évènement. D’ailleurs, chaque marae semble fêter le Matariki à sa manière comme en témoigne le programme du Matariki festival qui recense les nombreuses animations à travers tout le pays.

Enfin, le Matariki revêt une dimension bien plus spirituelle qu’il n’y parait au premier abord. Cette période hivernale est l’occasion de se retourner sur l’année écoulée, de réfléchir sur soi-même, mais aussi de se souvenir des défunts. Une part du Matariki est donc personnel, propre à chacun, comme nous l’expliquait le chef du marae d’Orakei.

Matariki, le partage avant tout

Pour autant, le Nouvel An maori est un événement festif, familial et surtout convivial. En effet, le Matariki à la sauce 2014 c’est surtout un moment où les maori peuvent partager leur culture auprès d’autres communautés. Après de nombreuses années d’oubli, le Matariki est aujourd’hui célébré dans le pays entier.

Portail Marae et Wharanui

Portail du Wharanui

Une occasion en or pour les Maoris de présenter leur culture, et leurs arts aux Pakehas (les descendants des colons) et aux étrangers qui méconnaissent souvent cette culture et ses richesses. Cette ouverture sur les autres se traduit notamment par l’ouverture des portes du marae à tous, et même du Wharanui (la maison d’accueil), lieu hautement sacré. En temps normal, il faut y être cordialement invité. Le temps d’une journée, on est ainsi accueilli à bras grand ouvert chez eux, dans leur maison. Au sein du Wharanui, on a assisté à des chants et des danses traditionnelles présentées par la jeune génération. Les anciens du marae nous ont raconté l’histoire de leurs ancêtres, dont les portraits sont accrochés sur le mur du fond de chaque Wharenui, on s’est aussi initié au « hongi », le salut maori.

Plusieurs ateliers ont été mis en place au marae pour faire découvrir aux petits et grands l’art du cerf-volant, dévoiler les techniques de création en flax (une plante aux larges feuilles vertes qui est utilisée pour créer les vêtements, les panes et certains objets de la vie courante) et goûter le hangi, le fameux plat maori…

Les Maoris aiment parler de leur culture, la transmettre et la partager. Après ce qu’on a vécu, on peut le dire : c’est un exercice dans lequel ils excellent ! Et d’ailleurs, ils en sont récompensés : lors des différentes manifestations auxquelles on a assisté, on a rencontré non seulement beaucoup de Maoris, mais aussi de nombreuses familles Pakehas ou étrangères, venues admirer les arts et les spectacles maoris.

Matariki, inscrit dans la modernité

Bien qu’il y ait une part très forte de tradition dans cet évènement, le Matariki se modernise et ne se fête plus seulement à la mode d’autrefois. Cela, nous avons pu le voir notamment lors des animations au musée d’Auckland. Durant une après-midi complète, de nombreux artistes se sont succédé sur la scène, installée pour l’occasion sous le dôme de verre du musée.

Deux prestations nous ont vraiment marquées : celles de trois jeunes slameurs qui à travers leurs poèmes nous ont raconter leur culture et la manière dont ils la vivent et la ressentent. Bon, on a pas tout compris, on l’avoue (le slam en anglais kiwi, c’est pas de la tarte !) mais on a senti chez eux une véritable volonté de partager leur vision d’une culture maorie moderne qui vit avec son temps.

La seconde prestation marquante a été celle d’un jeune musicien que vous pouvez voir au début de la vidéo. Pendant près d’une heure, il a joué des instruments traditionnels maoris créés à partir d’os ou de bois. Une belle passerelle entre le passé et le présent. Plus qu’une envie de fêter la nouvelle année, ces artistes nous ont surtout donné l’impression d’inviter les gens, pour la plupart étrangers, à rencontrer cette culture riche et diverse. Ils étaient présents pour expliquer et partager avec nous leurs origines, plutôt que de seulement fêter le passage à une nouvelle saison.

Enfin, la modernité s’exprimait aussi dans les sculptures et les peintures exposées dans le musée d’Auckland pendant un mois. Certaines pièces, très contemporaines, témoignaient de la vision avant-gardiste que leurs auteurs ont de leur culture.

Finalement, le Matariki Festival nous a réellement surpris. Nous avions certains a priori sur ce qu’on pensait y découvrir. En premier lieu, on ne pensait pas que ce genre de festivité attirerait autant de monde ! En effet, il n’y a eu quasiment aucune communication autour des évènements et pourtant, le marae, les musées et les animations nocturnes ont fait le plein de familles.

De plus, on s’imaginait découvrir la culture Maorie dans un aspect beaucoup plus traditionnel et stéréotypé. Finalement, on s’est rendu compte que le peuple maori nous a invités à fêter avec eux le Matariki tel qu’ils le fêtent aujourd’hui. Si l’on devait en tirer une conclusion, ce serait alors qu’il ne faut pas imaginer une culture. Il faut la vivre, se la laisser compter et se laisse le temps de la découvrir pour vraiment comprendre et apprendre ses richesses et sa diversité. Bref, mettre de côté ses attentes et ses préjugés. Laissez vous surprendre.

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